Pierre Loti (1850-1923), officier de vaisseau, indépendant de toute influence littéraire par son tour d’esprit et son peu de lecture, écrivit des romans dont l’auteur reste le principal personnage, et qui transportent de Constantinople en Afrique, à Tahiti, au Japon, au cours d’amours sans lendemain, son âme inquiète, rêveuse, et souffrant de sa stérilité (Le Roman d’un spahi, Le Mariage de Loti, Mon frère Yves, Madame Chrysanthème, etc., 1878-1892). Pêcheur d’Islande (1886), qui fit sa gloire, est demeuré son chef-d’œuvre. Dans ces livres peu variés comme sentiments, faits d’évocations mélancoliques, de rêveries devant des civilisations ou des âmes très neuves ou très vieilles, l’auteur se montre hanté par l’ennui de vivre, la peur devant la décadence et la mort.
Rudyard Kipling (1865-1936) habita jeune l’Inde où il fréquenta les types les plus divers, et révéla à ses lecteurs anglais la poétique grandeur de ce pays si antique et si neuf. Ses premiers contes et romans (1888-1901) durent leur immédiat succès dans tous les pays à leur humour allègre, à leur apothéose de l’énergie, à leurs peintures de mœurs. Ses Livres de la Jungle (1889, 1895) ont renouvelé d’admirable façon la vieille épopée animale. Kipling excelle à trouver le détail original et vrai, à évoquer avec précision les spectacles les plus inconnus, à conter avec une brusquerie joyeuse et parfois émue. Son art a agi sur certains écrivains de divers pays.