Anatole France

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Anatole France (1844-1924), type accompli du pur lettré, en qui se retrouvent le dilettantisme de Renan et l’ironie de Voltaire, mais chez qui la fantaisie intellectuelle se pare toujours d’un reflet émané de la beauté antique, présente d’abord, dans le Crime de Sylvestre Bonnard (1881), une figure vraiment exquise de vieux savant sceptique et doux; c’est, en réalité, de son propre esprit libre et agile, nourri de tous les sucs de l’humanisme qu’il dessine ainsi le portrait. Cet esprit, il le promène ensuite à travers des décors empruntés à l’hellénisme raffiné de la civilisation alexandrine où l’esprit chrétien commençait de s’infiltrer (Thaïs, 1890), puis à notre XVIIIe siècle (la Rôtisserie de la reine Pédauque; les Opinions de Jérôme Coignard, 1893). Enfin, il aborde résolument l’étude de notre époque dans la série des romans d’histoire contemporaine (l’Orme du Mail, le Mannequin d’osier, l’Anneau d’améthyste, M.Bergeret à Paris, 1896 à 1901). Ces romans, qui sont à peine des romans, mais plutôt des chroniques au jour le jour, inspirées par l’actualité et que relie le fil le plus ténu, montrent jusqu’où le genre du roman étend désormais ses frontières sans cesse élargies. L’inoubliable M. Bergeret y juge, avec une indulgence à vrai dire décroissante de livre en livre, les ambitions, les amours, les préjugés, les partis pris du monde bourgeois vers la fin du XIXe siècle. Autour de lui, l’ironie d’Anatole France esquisse de vifs croquis de la vie de province et groupe des figures légèrement caricaturales. Mais, plus encore que dans les portraits, c’est dans les « conversations » qu’il excelle. Nul aujourd’hui n’a su « causer la plume à la main », avec autant d’aisance et d’ingéniosité. Ces qualités, à travers lesquelles se joue une grâce un peu fuyante, sont aussi celles de son style souple et nuancé.

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George Sand – Nohant

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Saint-Exupéry – écrivain et aviateur

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Maurice Maeterlinck

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Un pauvre trouvère

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Rutebeuf, esprit fécond et varié, vécut au XIIIe siècle. Il mena une vie misérable, n’ayant d’autre gagne-pain que ses vers, et s’en prenant à la société, dans son poème satirique de la Vie du monde, de son existence pauvre et pénible.

Dans le texte suivant, Rutebeuf se plaint de la misère et du froid accueil qui l’attend chez lui, quand il y entre les mains vides. Il prie Dieu de lui tenir compte de toutes ses souffrances, et de l’admettre un jour dans le paradis.

Je ne suis pas ouvrier des mains; on ne saura jamais où je demeure, à cause de ma pauvreté. Jamais ma porte ne sera ouverte, car ma maison est trop déserte, et nue et délabrée.

Souvent je n’ai ni pain ni pâte. Ne me blâmez pas si je me hâte d’en sortir, vu que jamais je n’y trouverai bon visage; ma venue n’y est pas aimée, si je n’y apporte rien.

C’est ce qui me décourage le plus, de n’oser franchir ma porte les mains vides. Savez-vous où j’en suis réduit? L’espérance du lendemain, voilà mes fêtes …

Or je prie Dieu qu’il lui plaise que cette douleur, ce tourment, cette folie me compte à véritable pénitence, de façon que je puisse vivre près de lui! Amen.

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