
Édouard III, vainqueur à Crécy, alla aussitôt mettre le siège devant la ville de Calais. Il y fut retenu plus de dix mois, mais il détestait les habitants de cette ville qui, par leurs courses sur mer, avaient causé de grands dommages au commerce anglais. Pour montrer sa ferme résolution de s’emparer de la place, il traça autour d’elle non plus seulement un camp, mais une véritable ville. Philippe VI de Valois essaya en vain de secourir Calais; il ne put s’approcher et l’héroïque gouverneur, Jean de Vienne, dut enfin capituler (1347). Édouard III voulait d’abord que la ville se rendît à discrétion; il exigea ensuite que six bourgeois vinssent en chemise, la corde au cou, lui apporter les clefs de la place.
La désolation fut grande dans Calais. Eustache de Saint-Pierre se dévoua avec Jean d’Aire, Jacques et Pierre de Vissant et deux autres bourgeois; ils se présentèrent devant Édouard irrité, qui ordonna de les conduire à la mort. Les seigneurs intercédèrent inutilement en leur faveur. La reine alors se jeta aux pieds d’Édouard, le suppliant d’avoir pitié de ces hommes.
Le roi attendit un peu à parler et regarda la bonne dame sa femme, qui pleurait à genoux moult tendrement; le cœur lui mollit et il dit: « Hé! dame, j’aimerais mieux que vous fussiez autre part qu’ici. Vous me priez tant que je ne vous ose refuser, et quoique je le fasse avec peine, tenez, je vous les donne; faites-en à votre plaisir. » La reine fit lever les six bourgeois, les fit revêtir et donner à dîner tout aise et reconduire dans la ville.
Édouard chassa tous les habitants de Calais et repeupla la ville avec des familles anglaises, mais Eustache de Saint-Pierre resta et la reine lui fit rendre ses biens.
Le reste du règne de Philippe de Valois fut encore attristé par un fléau pire que la guerre: la peste noire. Le peuple, dans sa fureur, s’imagina que les juifs avaient empoisonné les puits et les fontaines et en fit d’affreux massacres. Par cette peste horrible, l’Europe se vit privée d’un tiers de ses habitants (1348).
Philippe VI de Valois mourut en 1350 après un règne dont les désastres devaient être dépassés par ceux du règne suivant.


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[JEAN FROISSART]

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